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Catégorie : Hydroéléctricité

LA VICTOIRE !

AU BOUT D’UNE LONGUE BATAILLE…

Ce document a été réalisé par Robert Joumard, Ancien directeur de recherche émérite  avec le concours de la mairie de Chanteuges, de SOS Loire Vivante European Rivers Network, de Chanteuges Préservation du Patrimoine, de l’AAPPMA de la basse Desges, de la Fédération départementale de pêche de la Haute-Loired’Allier Sauvage, de l’Association Nationale pour la Protection des Eaux & Rivières, du Chant des rivières, du Conservatoire National du Saumon Sauvage et d’habitants de la Communauté de communes.
Il a été complété et mis à jour fréquemment depuis sa première version du 13 octobre 2017.

Le projet de microcentrale en bref :

Chanteuges est une commune rurale de 471 habitants située à une trentaine de kilomètres à vol d’oiseau à l’ouest du Puy-en-Velay, riche de ses monuments historiques et de la rivière Desges qui accueille le Conservatoire national du saumon sauvage grâce à la pureté de ses eaux et à sa biodiversité.

Le village est traversé par un bief qui réutilise depuis deux cent ans un bras secondaire de la rivière. Il est en ruine car inutilisé depuis 1992 et est redevenu un ruisseau qui serpente au milieu des prés. Déjà propriétaire du bâtiment d’un ancien moulin, le SECCOM devenu la Communauté de communes des Rives du Haut-Allier achète un autre ancien moulin en 2016. Les deux anciens moulins disposant selon le SECCOM du bief et d’un droit d’eau commun, l’objectif est de réaliser une microcentrale hydraulique et de vendre l’électricité produite.

Vue du Béal amont serpentant dans les prés, avant travaux
Vue du Béal amont serpentant dans les prés, avant travaux

Le projet consistait à transformer le bief-ruisseau pour sa partie amont au milieu des prés en un double mur de béton de 500 m de long et de 1,20 à 2,50 m de haut, et pour sa partie aval à le remplacer sur 600 m par un tuyau de 1,20 m de diamètre avec l’eau sous pression. L’arrêté préfectoral du 15 novembre 2018 portant règlement d’eau interdit théoriquement de modifier la partie amont et porte le diamètre du tuyau en aval à 1,23 m. Le projet consiste aussi à installer une turbine hydraulique et un transformateur au centre du village, juste à côté de l’auberge, et à rejeter l’eau turbinée dans la Desges 1100 m en amont du Conservatoire du saumon sauvage.

Banderole apparue le 22 novembre 2017

Ce projet a été particulièrement mal préparé, sans étude économique un tant soit peu sérieuse, sans aucune étude d’impact préalable sur le paysage, sur l’attrait touristique du village, sur la biodiversité, sur la vie aquatique de la Desges, sur la pêche, sur le bruit et les vibrations, sur le Conservatoire du saumon, sur les constructions proches de la conduite forcée envisagée.

Lire la suite : ICI

Poutès, et autres nouvelles du saumon…

Le 19 août 2019, ANPER TOS déposait auprès du tribunal administratif de Clermont-Ferrand un recours en annulation de l’arrêté préfectoral du Préfet de Haute Loire autorisant la reconfiguration du barrage de Poutès.

Barrage de Poutès – crédit photo Logrami

Nous remettions en cause cette reconfiguration qui allait à l’encontre des mesures nécessaires au rétablissement d’une population viable de saumon sur l’Allier, sachant que depuis 1943 l’ouvrage bloquait l’accès à 120 km des meilleures frayères et zones de grossissement. Nous avions fait valoir, connaissances et expertises scientifiques à l’appui, que ce barrage même aménagé n’avait pas lieu d’être. Les lecteurs se souviendront notamment du fameux rapport produit à la demande de l’État par Monsieur Philippart de l’Université de Liège, qui préconisait son arasement.

Depuis de l’eau a coulé dans l’Allier et EDF a construit sa défense, à laquelle il a fallu répliquer. Nonobstant la procédure en cours, les travaux ont commencé, se traduisant dès la vidange au printemps 2019 par une pollution majeure aux sédiments fins qui a anéanti la vie piscicole sur 10km, et ce quoiqu’EDF nous ait fait milles promesses de ce que l’opération serait sans conséquence. ANPER TOS et sa partenaire dans le dossier Nature Haute Loire ont donc lancé une procédure pénale qui devait finalement déboucher sur une CJIP (Convention Judiciaire d’intérêt Public) pour compenser les dégâts…

On notera d’ailleurs qu’EDF avait proposé de réparer en ne procédant qu’à un rempoissonnement. Notre position sur ce point et quant au saumon est connue : c’est aussi inutile que potentiellement dangereux pour les populations sauvages, là aussi la littérature scientifique est très éclairante. Quant aux autres espèces, EDF aurait été bien en peine de fournir des poissons qui ne sont pas produits en pisciculture et présents dans les inventaires piscicoles, vandoise, barbeau, ombre ligérien ou toxostome par exemple, et pour certains protégés totalement ou partiellement…A l‘heure où nous écrivons, EDF n’a toujours pas donné suite à la CJIP initiée par le procureur du Puy en Velay en mai 2022.

ANPER TOS a de nouveau porté plainte

En décembre 2022, la retenue a été mise en eau. Nouvelle déconvenue, la retenue prévue pour faire 450m de long selon le cahier des charges autorisé par arrêté du Préfet de Haute Loire mesure 1350m. Le sort s’acharne dès lors sur les saumons qui ont franchi l’ouvrage puisqu’une frayère creusée dans le lit amont de l’ancienne retenue se retrouve ennoyée. L’eau ne circulant plus entre les galets formant le nid, la précieuse ponte a été perdue. ANPER TOS a de nouveau porté plainte.

Ce 27 juin 2024, le tribunal de Clermont Ferrand nous a débouté sur le dossier administratif, presque cinq ans après avoir déposé le dossier. Il n’a pas été possible pour nous de laisser tomber le saumon de l’Allier et le Conseil d’Administration a validé en août 2024 un appel de cette décision auprès de la Cour Administrative d’Appel de Lyon.

La situation interpelle et nous attriste vivement. Entretemps, en partenariat avec d’autres associations (APS, ERN, FNE AURA, FNBE Allier, FRANE, AAPPBLB) ANPER a également contesté le projet de mise en œuvre d’une microcentrale au droit du barrage de Vichy, c’est dire si l’État fait peu de cas du saumon de l’Allier dont seulement 62 valeureux individus ont été comptés cette année aux passes de Vichy.

Les résultats Outre-Manche ont été globalement mauvais, à part pour les castillons dans le nord-ouest de l’Écosse.

En Bretagne, sur le Scorff, un seul poisson de printemps a été comptabilisé et seulement quarante-cinq castillons, sur l’Elorn on a compté soixante-douze poissons en tout et pour tout.

Saumon du Gave d ‘Oloron

Quant aux Gaves, les remontées atteignent à peine la moitié de la valeur moyenne de ces dernières années …

La situation devient réellement tendue et pénible. Il est difficile de garder un quelconque optimisme et nous dénonçons ici le total désintérêt de L’État et des collectivités pour préserver le saumon et nos rivières, sacrifiés sur les autels de l’agro-industrie et de la production d’hydroélectricité à tout prix.

Pourtant, avec un peu de bonne volonté cet État si défaillant est capable de prendre ici et là les dispositions qui s’imposent et nous saluons l’arasement du seuil du Moulin-Marchand sur le Léguer effectué d’office en juin dernier après des années de procédures et de mises en demeure de rétablir la libre circulation piscicole. Le Conseil d’État n’a pas cillé et, par son arbitrage, a donné enfin l’impulsion nécessaire à l’arasement de ce seuil.

 Mais à quand la libération des filets de l’Adour, puis de la bande côtière ? A quand un franchissement libre de Vichy sur l’Allier ?

Raphaël AMAT  administrateur ANPER TOS

DESCARTES, quand les RIVIÈRES répondent elles- mêmes

On se souvient que le 14 juillet 2021, une crue subite avait emporté un clapet amovible de 18 tonnes au barrage de Descartes, et depuis nous étions dans l’expectative quant au devenir de ce barrage. Déjà endommagé par une crue dans les années 1990 et réparé pour 1,3 millions d’euros d’argent public, ce barrage avait suscité la convoitise d’une société d’économie mixte (Forces Hydrauliques de Descartes, ou FHD), qui souhaitait l’équiper d’une microcentrale de 1Mw – soit 110 fois moins que le barrage d’Eguzon situé beaucoup plus haut sur le bassin.

La crue a rebattu les cartes:

Les élus locaux accusaient le site Vigicrues ainsi que, à mots couverts, le complexe des barrages d’Eguzon d’être à l’origine de l’accident. Or la crue venait de la Gartempe, en aval d’Eguzon. Fin 2022 lors d’une réunion à Descartes une intervention de l’OFB a rappelé que les barrages à clapets sont munis d’un système de détection des niveaux qui déclenche automatiquement l’abaissement des clapets. Tout pris par leur projet, les responsables ne s’étaient pas préoccupés du barrage lui-même. Et si les élus locaux, soutiens inconditionnels de la microcentrale, doivent accuser quelqu’un de négligence, qu’ils regardent du côté de la FHD. Tant qu’il s’agissait de tirer parti un barrage réhabilité par de l’argent public, tout allait bien pour les investisseurs.

Mais lorsqu’il est question de devoir assumer les frais de réparation, rien ne va plus et les pétitionnaires ne se bousculent pas. Forces hydrauliques de Descartes a donc demandé à être libérée de son engagement et le barrage retombe dans le giron de l’État, qui n’a pas l’intention de le reconstruire et souhaite seulement le sécuriser. La SEPANT, FNE et ANPER-TOS n’ont pas retiré leur plainte, car nous attendons que cela se concrétise sur le terrain par l’ouverture complète de ce barrage, qui a failli être un gâchis écologique et demeure un gâchis financier.

Comme quoi le Progrès c’est désormais la somme des efforts consentis pour en corriger les effets. Et maintenant, il nous faut nous intéresser au barrage suivant, celui de l’ancien moulin de La Guerche, toujours en infraction.