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ANPER et l’écrevisse à pattes blanches

ANPER participe à la préservation de l’écrevisse à pattes blanches
« Austropotamobius pallipes »

« Plusieurs espèces d’écrevisses sont naturellement présentes dans nos cours d’eau « 

Ces trois espèces d’écrevisses sont protégées par de nombreux textes juridiques français et internationaux dont la Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe, la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) mais aussi la Directive Habitat de l’Union Européenne.

De fait, ces écrevisses sont protégées et de nombreuses mesures sont mises en place pour essayer de remédier à leur disparition.
Dans la suite de cet article, nous allons nous concentrer sur l’écrevisse à pattes blanches car elle a fait l’objet d’une mesure de protection mise en place par ANPER.

Il y a plusieurs décennies, l’écrevisse à pattes blanches (ou écrevisse à pieds blancs), était présente un peu partout en France mais elle a aujourd’hui disparu dans plusieurs régions à cause de différentes pressions environnementales.

« L’écrevisse californienne peut être porteuse saine de la peste de l’écrevisse (…) mais peut la transmettre aux écrevisses françaises .« 

Parmi les méthodes utilisées pour la protéger, on trouve la capture des espèces invasives comme l’écrevisse de Californie, Pacifastacus leniusculus, qui portent atteinte aux populations d’écrevisses à pattes blanches. Ces dernières, contrairement à nos écrevisses locales, sont exogènes car elles ont été introduites en France dans les années 60 notamment pour agrémenter les étangs de certains particuliers (En savoir plus).

Sauf que, petit à petit, ces écrevisses ont trouvé le chemin des cours d’eau naturels et, compte tenu de leur taille et de leur agressivité, elles ont décimé de nombreuses  populations d’écrevisses locales. De plus, l’écrevisse californienne peut être porteuse saine de la peste de l’écrevisse : elle n’est pas atteinte par cette maladie mais peut la transmettre aux écrevisses françaises provoquant ainsi leur mort.
Réguler les populations d’écrevisses californiennes en effectuant des prélèvements réguliers permet d’éviter que leur développement trop important nuise aux écrevisses locales. Il est interdit de les transporter vivante donc leur déplacement n’est pas envisageable. Les écrevisses de Californie attrapées sont incinérées .

ANPER participe à cette régulation d’espèce en Normandie et plus précisément dans la Zone Spéciale de Conservation FR 2500118 « Bassin de la Druance », classée ainsi en raison de la présence d’écrevisses à pattes blanches. Thierry, un adhérent et bénévole d’ANPER, pose tous les ans, des nasses (sorte de piège) dans certains cours d’eau qu’il a préalablement repérés comme abritant des écrevisses californiennes. La nuit les écrevisses entrent dans les nasses et sont ainsi piégées.
Une autre technique consiste tout simplement à retourner, de jour et dans le lit mineur du cours d’eau, les matériaux grossiers (galets, pierres) sous lesquels se cachent parfois les écrevisses.
Il est toutefois essentiel que soient remis en place les galets et pierres sur le dessous desquels vivent des larves diverses.

En 2020, à cause des conditions sanitaires, les prélèvements n’ont pu être effectués que tard dans l’année (décembre) ce qui a entraîné un résultat très faible de capture car lorsque l’eau atteint une certaine température, les écrevisses rentrent en léthargie et l’on ne peut plus les capturer. Dès que l’eau se réchauffera, les prélèvements pourront reprendre.

La Franche Comté, franchement victime de son comté

Le Comté est l’appellation d’origine d’un fromage français transformé principalement en Franche-Comté et bénéficiant d’une AOC depuis 1958 et d’une AOP depuis 1996.
Son aire de production s’étend dans les départements du Jura, du Doubs et l’est de l’Ain

Le succès commercial de ce fromage a entraîné une augmentation importante de sa production (de 43 000 tonnes en 1998 à 67 000 tonnes en 2018, soit + 55 %). Les pratiques agricoles en ont été radicalement transformées, et ont conduit à une dégradation continue de la qualité des eaux des rivières comtoises. Les ex-plus belles rivières d’Europe souffrent d’eutrophisation, les substrats sont étouffés par des algues filamenteuses, les populations d’insectes aquatiques se sont effondrées, les biocénoses (poissons y compris) ne sont plus que l’ombre (!) de ce qu’elles étaient.

Comment a-t-on pu en arriver là ?
Comment ce qui contribuait à la richesse d’un pays a-t-il conduit à son appauvrissement ?

Dans un premier temps, le prix du lait (le prix payé aux producteurs) grimpe. Ceux-ci, sous la houlette des chambres d’agriculture et du CIGC (Comité interprofessionnel de Gestion du Comté) désirent augmenter leur production pour augmenter leur chiffre d’affaires. Pour faire du Comté, il faut de l’herbe et des vaches.

Pour produire plus d’herbe, il faut intensifier les rendements : donc on mécanise, on laboure, on plante de l’herbe à plus haut rendement comme les ray-grass, et on fertilise. On augmente également les surfaces cultivées, en supprimant les autres cultures, en mécanisant  la production et notamment le fauchage, ce qui nécessite de supprimer les haies, d’araser les murgers, de passer le casse-cailloux sur les zones où les terres sont trop peu profondes…

Pour produire plus de lait, on sélectionne les vaches sur leurs capacités laitières, on augmente le nombre de bêtes à l’hectare, on importe des régions céréalières voisines les compléments alimentaires qui étaient produits auparavant dans la zone comté.

Les paysans investissent, faisant le bonheur des banques, des vendeurs de matériels, de tracteurs, de hangars…

Les exploitations évoluent de l’élevage sur paille vers des élevages sur lisier. Les quantités à évacuer sont alors de plus en plus importantes. Les épandages se font sur les terrains qui se saturent en azote. L’excédent d’azote se retrouve mécaniquement dans les rivières par le lessivage des sols.

Malgré les protestations vigoureuses des associations et notamment de ANPER, du collectif SOS LRC, de FNE, de la Cpepesc…, malgré  les manifestations organisées, malgré la saisine des instances administratives, force est de constater que la politique productiviste continue d’être le moteur du CIGC, soutenu par la FNSEA et les chambres d’agriculture, et bénéficie de la bienveillance de l’État et des Départements.

Les mêmes dérives productivistes menacent les autres zones d’AOP, comme l’Auvergne (St Nectaire) ou les Causses (Roquefort), ainsi que les Pyrénées où l’augmentation des surfaces de pacage ne cessent d’empiéter sur les territoires de l’Ours.

Poules de luxe en Côte d’Or

« Plus il y a de volailles, plus l’établissement est soumis à des normes environnementales strictes, notamment en matière de prélèvements d’eau. »

Poulailler industriel
Crédit photo: Pixabay/Capri23auto

Certains ont été mis sous le feu des médias et d’autres sont passés inaperçus. En tout cas, entre 2017 et 2020, nous avons recensé la création de 17 poulaillers (volailles « de chair » ou « pondeuses ») sur le territoire français. Ils sont considérés comme étant des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) à partir de 5 000 volailles. A partir du moment où ils sont définis comme étant des ICPE, ils doivent suivre et respecter certaines normes environnementales.

Il existe trois « échelons » d’obligations pour les ICPE. Plus il y a de volailles, plus l’établissement est soumis à des normes environnementales strictes, notamment en matière de prélèvements d’eau. Les poulaillers industriels sont répartis comme suit :

Annexe (3) à l 'article R511-9 du code de l'Environnement : Nomenclature des ICPE et taxes générales sur les activités polluantes

Annexe (3) à l ‘article R511-9 du code de l’Environnement : Nomenclature des ICPE et taxes générales sur les activités polluantes

Sur le papier cette distinction est louable mais, la réalité est toute autre.
Par exemple, sur les 17 poulaillers que nous avons recensés, sept (environ 41%) ont déclaré élever 39 999 volailles … La différence entre 39 999 et 40 000 volailles est futile et l’impact sur l’environnement sera très similaire si ce n’est identique.
Par contre, les obligations en matière environnementale seront très différentes. En effet, comme vous pouvez le voir dans le tableau ci-dessus, un poulailler de plus de 40 000 emplacements passe du régime de Déclaration à celui d’Autorisation et cela a de lourdes conséquences pour la personne concernée. L’Autorisation implique, entre autres, de faire :

  • Une étude d’impact (notamment sur les ressources en eau) et son résumé non-technique
  • Une étude de dangers et son résumé non-technique

Deux études qui ne sont pas demandées pour un poulailler de 39 999 volailles puisque celui-ci sera soumis au régime de Déclaration.

Aux failles de ce système juridique s’ajoute, depuis plusieurs années en France, la sécheresse. Les étés deviennent de plus en plus rudes pour les cours d’eau et autres milieux aquatiques induisant également des conséquences pour la biodiversité qui y vit.

Pour essayer de lutter contre cela, tous les ans, des mesures locales sont adoptées pour réguler l’utilisation de l’eau sur un territoire déterminé avec d’autres mesures déjà présentes qui constituent la politique de l’eau (SDAGE et SAGE) locale. Elles ont pour objectif de gérer au mieux et le plus équitablement possible la ressource en eau sur un territoire et une période déterminée.

Les effets de la sécheresse sont particulièrement importants dans le département de Côte d’Or (21). Cette année par exemple, un communiqué de presse de la préfecture annonçait le 21 août 2020 que « La situation de sécheresse subie par la Côte-d’Or depuis ce mois de juin s’est sensiblement aggravée. » et la carte ci-dessous fait état de la situation. Les poulaillers industriels qui émergent, comme tout autre ICPE, devrait faire l’objet d’une étude approfondie de leurs impacts sur l’environnement et, notamment, sur les ressources en eau qu’ils utilisent.

Malgré cette situation critique et les obligations environnementales mises en place pour y remédier, ANPER a reçu plusieurs messages d’alerte ou demandes d’aide de la part de particuliers dont les intérêts personnels ou les intérêts généraux semblent être mis de côté … Plusieurs poulaillers ont fait l’objet de controverses. Parmi les raisons qui nous ont été rapportées par des adhérents, nous trouvons :

  • La construction prématurée du poulailler : celui-ci se construit avant la fin de l’enquête publique donc, avant d’être autorisé ;
  •  La proximité du poulailler avec des habitations de riverains qui ont lutté pendant la durée de l’enquête publique pour que le poulailler ne se fasse pas à cet endroit.
    ATTENTION nous rappelons ici que le délai pour s’exprimer dans ce type de cas n’est que de deux mois ! Vous aurez beau vous exprimer après, vos remarques ne seront pas prises en compte. N’hésitez pas, c’est votre droit ! ;
  •  L’impact du poulailler sur le milieu naturel et/ou les espèces animales ou végétales qui vivent à proximité. La quantité d’eau nécessaire pour un poulailler rassemblant entre 30 000 et 40 000 volailles est importante, en particulier lorsque les poulaillers se multiplient, comme c’est le cas en Côte d’Or et qu’il s’agit d’un territoire qui subit la sécheresse pendant presque la moitié de l’année. Ces prélèvements peuvent avoir des répercussions sur le milieu (assèchement) et/ou sur les espèces animales et végétales (destruction d’habitats).
  •  Le manque d’eau subit par des riverains et devenu récurrent depuis l’installation d’un poulailler. Face à cela, aucune réponse n’est apportée par l’administration …

Mais sous couvert de délais de prescriptions dépassés (En savoir plus ), de soutien par les pouvoirs publics ( En savoir plus), de dossier d’enregistrement déjà accepté et de travaux déjà effectués, les poulaillers industriels semblent intouchables en Côte d’Or.

Face à cela, les principes et fondements de l’agroécologie ont disparu. Le Gouvernement français dit pourtant vouloir mettre en avant ces pratiques plus respectueuses de l’environnement et des ressources ( lire aussi )mais jusqu’ici, il semble avant tout encourager les exploitations industriels qui ne sont certainement pas la solution aux problématiques actuelles ; qu’elles soient sociologiques, économiques ou environnementales.

COMMUNIQUE DE PRESSE

L’intervention volontaire d’ANPER dans l’Affaire du siècle : souligner l’inaction de l’état français sur les problématiques liées à l’eau face au réchauffement climatique.

Depuis 1958,} l’Association Nationale pour la Protection des Eaux et Rivières (ANPER) se bat pour protéger les eaux françaises. Dans ce cadre, le 8 octobre 2020 l’association a décidé de former une intervention volontaire dans le cadre du procès intenté par la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace, Notre Affaire à Tous et Oxfam contre l’Etat, dit:
« l’Affaire du siècle ». L’objectif de ce procès:
démontrer la carence fautive de l’Etat face au changement climatique et le non-respect de ses obligations internationales et nationales sur ce sujet.
L’objectif de notre intervention volontaire :
mettre en avant les effets de l’inaction de l’Etat face à cette problématique et plus précisément quant à l’impact que cette inaction induit sur cette ressource qui nous unit : l’EAU.

Une intervention volontaire pour pointer du doigt la gravité de la situation


En plus d’avoir des conséquencessur la qualité de l’air, du sol et sur la santé des français, l’inaction de l’État face au réchauffement climatique impacte directement la ressource en eau ainsi que sa qualité. Il devrait pourtant être admis aujourd’hui que l’eau est précieuse et surtout, qu’elle n’est pas inépuisable. Il s’agit d’une ressource fragile en quantité comme en qualité, et qu’il faut utiliser avec modération et de manière équitable. Au-delà des nombreuses atteintes à la qualité de l’eau qui peuvent arriver en France à travers les pollutions industrielles, agricoles, et le fractionnement des cours d’eau, ANPER souhaite dénoncer dans cette intervention la manière dont L’État met de côté, oublie ou même piétine ses obligations en la matière.

Les revendications d’ANPER pour protéger la ressource en eau

Faute de pouvoir tout expliquer et dénoncer dans son intervention volontaire, l’Association Nationale pour la Protection des Eaux et Rivières a choisi 4 points à mettre en avant :

  • L’absence de réduction des autorisations de prélèvement agricoles pour l’agriculture intensive : trop peu de mesures sont prises pour essayer de changer les habitudes agricoles. Le réchauffement climatique et l’augmentation des impacts des sécheresses répétées ces dernières années devraient suffire pour justifier un réajustement des autorisations de prélèvements d’eau, en particulier lorsque ceux-ci sont dédiées à agriculture intensive en contradiction avec l’agroécologie pourtant promue par le gouvernement.
  • Le choix de L’État de développer les retenues collinaires et de substitution pour l’irrigation agricole, sans modifier les pratiques culturales : le développement de ces retenues, aussi appelées « bassines », est contraire aux engagements de l’Etat pour lutter contre le réchauffement climatique. Cette mesure est, encore une fois, mise en place pour soutenir une agriculture intensive qui ne peut avoir de futur dans un monde comme le nôtre, où l’eau est une ressource limitée. De plus, L’État vante les mérites de ces retenues collinaires alors qu’il s’agit d’une « hérésie totale  » et un non sens . Entre autres, elles n’aideront pas à résoudre le problème de pénurie d’eau puisqu’au contraire elles augmentent l’évaporation et ne permettent pas la recharge des nappes souterraines, sans parler de l’accaparement de cette ressource par quelques-uns …
  • La disparition continue des zones humides par l’effet de l’inaction étatique face aux changements climatiques : depuis 1950, les zones humides ont reculé de plus de 75 % en France métropolitaine. Ces réservoirs de biodiversité sont réduits par l’expansion des drainages, des zones industrielles et du bitume et disparaissent progressivement. Face à cela, L’État français ne fait qu’alléger les procédures d’autorisation de construction et d’exploitation … Les services écosystémiques (dont le stockage du carbone) pouvant être rendus par une zone humide sont pourtant importants et vont dans le sens des préconisations face au réchauffement climatique.

Conclusion:

La source de ces choix illogiques ou de cette inaction se trouve dans l’influence permanente des lobbys. Ils sont présents dans beaucoup de domaines et contrôlent L’État grâce à leur poids financier. Il est triste et décevant de constater qu’en 2021, la France, qui est présente dans les plus grandes institutions internationales, n’est pas capable d’assumer quelques choix pourtant indispensables pour notre environnement et pour les générations futures.

Il semble inutile de répéter une nouvelle fois que nous sommes en ce moment dans une période charnière qui pourrait bien être notre dernière chance d’inverser la tendance. Les cours d’eau se meurent, la biodiversité aquatique disparait et la ressource « eau », qui est déjà manquante dans plusieurs endroits dans le monde, se raréfie de plus en plus.

Tous ces arguments nous ont poussé à former cette intervention volontaire qui, nous l’espérons, interpellera certains politiciens, industriels et toute personne consciente de la période charnière que nous vivons. Les pouvoirs décisionnaires vont-ils enfin tirer les conséquences de ce que désormais nous savons tous ?

Nous sommes convaincus que si chacun fait sa part, les choses peuvent s’améliorer mais il est vrai que sans un État mettant ses actes en conformité avec ses annonces et abandonnant des visions de court terme, il sera plus difficile d’améliorer la situation.

À vous, et à nous de nous battre encore plus.

Jean Michel FERRY, Président d’ANPER